09 Juin Et si nous étions capables d’entendre les mouvements
La « sonification », qu’est-ce que c’est ?
Tiré des travaux de J. Danna, J.L. Velay et leurs collaborateurs, la « sonification » consiste à traduire une variable d’un mouvement, normalement silencieuses, en un son artificiel qui, lui, serait perceptible et donc traitable.
Autrement dit, lorsqu’un adulte trace un « L » en lettre cursive, il accélère naturellement son mouvement à la montée et à la descente de la boucle, tandis qu’il ralentira à l’entrée du virage (en haut de la lettre).
Entendre un mouvement, pourquoi faire ?
En début d’apprentissage, il peut être difficile pour le sujet apprenant de savoir si ses mouvements sont bien ou mal réalisés. C’est en s’entraînant à écrire que l’apprenant va inhiber les gestes peu naturels biomécaniquement et encoder en mémoire les bons gestes d’écriture jusqu’à ce que l’exécution de ses mouvements soient automatiques.
Chez les enfants dysgraphiques, des anomalies dans l’exécution des mouvements d’écriture ont été mis en évidence. Ces enfants présentent des difficultés à repérer les mauvais et bons gestes, ce qui peut gêner l’automatisation et donc l’activité d’écrire.
Cependant, si ces enfants étaient capables de repérer en temps réel leurs mauvais mouvements, ils seraient en mesure de se corriger instantanément. En laissant peu de place à l’erreur au cours de l’apprentissage du geste d’écriture, les enfants auraient plus de faciliter à automatiser le geste et donc permettrait une écriture plus fonctionnelle.
Traduire le geste d’écriture en son, quelle variable choisir ?
Traduire le geste d’écriture en son implique de choisir quelles caractéristiques des mouvements produits sont pertinentes à repérer et à corriger pour l’apprenant. Les chercheurs ont analysé plusieurs caractéristiques lors d’activités d’écriture chez des enfants dysgraphiques et ont isolé 5 variables pouvant être pertinentes à sonifier : la vitesse d’écriture, la fluence (accélérations ou décélérations anormales), la pression du stylo sur le support, le nombre et le temps de levers de crayon.
La sonification pour la remédiation
Intégrer la sonification au sein d’un exercice d’écriture offre de nouvelles perspectives de remédiation pour la dysgraphie : le professionnel pourrait choisir parmi les caractéristiques les plus pertinentes celles qu’il souhaite travailler avec l’enfant. De plus et en fonction de la sélection du son émis, la sonification pourrait rendre un exercice d’écriture plus ludique, et donc plus motivant pour l’enfant.
Bibliographie
Danna, J., Paz-Villagran, V., Thoret, E., Gondre, C., Kronland-Martinet, R., Capel, A., Pétroz, C., Pierre, P., Cazès, O., Limozin, A., & Velay, J.-L. (2013). Sonifying handwriting movements as real-time auditory feedback for the rehabilitation of dysgraphia. IXth International Conference on Progress in Motor Control.
Danna, J., Paz-Villagran, V., Velay, J.-L., Gondre, C., Kronland-Martinet, R., Ystad, S., Aramaki, M., Thoret, E., Conan, S., Voinier, T., Omer, H., & Torrésani, B. (2012). Sonifier l’écriture : Un outil pour le diagnostic et la remédiation de la dysgraphie. Développements, 12(3), 32.
Danna, Jérémy, Paz-Villagrán, V., Gondre, C., Aramaki, M., Kronland-Martinet, R., Ystad, S., & Velay, J.-L. (2015). “Let Me Hear Your Handwriting!” Evaluating the Movement Fluency from Its Sonification. PLOS ONE, 10(6), e0128388.
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Ajuriaguerra, J., & Auzias, M. (1964). L’écriture de l’enfant. Delachaux et Niestlé.